L’ALSACE DU 07/05/2017 : Magail a vaincu ses vieux démons

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L'ALSACE DU 07/05/2017 : Magail a vaincu ses vieux démons

Après douze finales perdues, huit en championnat et quatre en Coupe de France, Magali Magail a enfin décroché ce titre derrière lequel elle court depuis 1998. Un soulagement, un exorcisme même pour celle qui se croyait maudite. La 13e fois aura été la bonne.

Elle s’est écroulée en pleurs sur le parquet de Coubertin, dans les bras de son adjoint de frère Christophe. Mais ces larmes qui avaient tant coulé sur les joues de Magali Magail ces vingt dernières années avaient une saveur différente, inconnue même. Hier soir, elles avaient ce goût si particulier de la victoire. « Enfin » , lâchait l’entraîneur mulhousien avec ce sourire digne d’une championne de France qu’elle est désormais. « Dix-neuf ans après ma première finale… Les années ont passé, j’ai beaucoup plus de rides aujourd’hui, mais c’est une délivrance car je m’étais mise à croire que je n’y arriverais jamais. »

« Si j’avais échoué cette année, je me serais dit : c’est moi le problème, il faut que j’arrête »

Elle y est arrivée au terme d’une rencontre qui a bien failli échapper à l’ASPTT Mulhouse dans le 4e set. Les cinq balles de match du Cannet, Magali Magail les a vécues comme ses joueuses : avec angoisse, fébrilité parfois, mais avec cette détermination qui a fait la différence. « C’est à ce moment que les filles ont commencé à jouer. Quand on était dos au mur, on a retrouvé nos vraies valeurs, notre attitude. Elles sont redevenues sûres d’elles et là, j’ai su qu’on irait au bout. »

Pendant 23 ans, le Racing Club de Cannes a régné – quasiment – sans partage. Avec le déclin du Racing, c’était l’année ou jamais pour Mulhouse. Meilleure équipe de la saison régulière, l’ASPTT voulait s’installer tout en haut du championnat de France. Elle y est parvenue, à Paris, dans cette ville lumière qui se prêtait parfaitement à son avènement. Et qui a eu le pouvoir d’exorciser tous les démons de Magali Magail. « Oui, j’ai douté de moi après toutes ces défaites, en convient-elle. Mais la domination de Cannes était tellement grande pendant plus de vingt ans ! Je suis née au mauvais moment, le club est arrivé à ce niveau au mauvais moment. Mais si j’avais échoué cette fois, je me serais dit : ‘‘C’est moi le problème, il faut que j’arrête’’. »

La malédiction est brisée, Magali Magail peut donc continuer à arpenter les routes de France. Avec le sentiment du devoir – enfin – accompli et un nouveau statut qui lui permet de dire aujourd’hui qu’elle a eu raison de s’entêter. « Ce qui me rend fière, c’est qu’on n’a jamais abandonné. Un titre, ça se joue à peu de chose. Il faut du talent bien sûr, mais aussi de la chance. Un ballon qui roule et qui tombe du bon côté… Cette année, on avait peut-être la recette, mais je sais qu’il ne pouvait rien nous arriver. »

« Avec ce titre, on est unies pour la vie »

Le titre enfin en poche, le plus dur reste à venir : durer, confirmer, prouver que cette réussite ne se résume pas qu’à de la chance, mais qu’il est bien le fruit d’un projet cohérent, solide, durable. « Dès le premier entraînement, les filles m’ont sauté dans les bras et m’ont dit : ‘‘On est venues pour gagner le titre’’. Ce titre, c’est une récompense pour elles aussi. Ce ne sont pas des mercenaires, elles aiment leur maillot, leur ville, leur région. Avec elles, on est unies à jamais. C’était une aventure tellement fantastique que j’espère qu’on ne va pas se séparer. »

Magali Magail était en pleurs et elle ne voulait pas que ça cesse. Sa peine, elle l’avait trop souvent ravalée jusqu’à en avoir la nausée. Hier soir, c’était tout sauf de la tristesse. Ce visage rougi et inondé de larmes, c’était du bonheur en barre. Ce genre de bonheur qui n’arrive que trop rarement dans une vie. Elle aura attendu 19 ans avant de goûter au titre suprême. Si ça, ça ne donne pas envie de chialer…

Article signé De l’un de nos envoyés spéciaux à Paris, Marc Calogero